Dirigeants, managers, la réforme de la formation vous concerne directement : êtes-vous prêts ?

Les gens ont-ils l’esprit disponible pour se former en ce moment ?  Les projets de formation sont-ils vraiment la priorité au regard du contexte ? La formation à distance est-elle vraiment “efficace” ?

Malgré la prolongation du confinement, la commission #ReinventWork a décidé de partager maintenant les contenus liés à l’événement qui a eu lieu le 4 mars dernier au sujet des enjeux de la réforme de la formation professionnelle. Selon nous, le contexte de cette crise accentue encore l’importance pour les individus et les entreprises de prendre le sujet à bras le corps, dès maintenant. La réforme responsabilise l’individu et l’entreprise pour garantir l’employabilité. La crise est devant nous. Le changement va être un outil nécessaire pour affronter collectivement la suite. Se former aux compétences du futur est d’autant plus important et ne peut pas être remis à demain.

Et si, en complément, ou à la place, du chômage partiel, les crédits formation étaient utilisés pour à la fois préserver les emplois et se préparer aux transformations à venir ? Et si nous nous saisissons des nouvelles approches pédagogiques pour innover tout en apprenant ? 

La formation est un levier essentiel pour transformer ce temps “subi” en temps de préparation d’une autre reprise.

Perrine Grua
Co-présidente de la commission #ReinventWork de l’ACSEL et co-fondatrice de France Apprenante


Dirigeants, managers, la réforme de la formation vous concerne directement : êtes-vous prêts ?

Perrine Grua, Co-présidente de la commission #ReinventWork de l’ACSEL et co-fondatrice de France Apprenante. ©JJ Repussard

Désormais en application, la réforme de la formation professionnelle impacte l’ensemble de l’écosystème RH mais aussi les travailleurs eux-mêmes. Cette loi appelée « Avenir Professionnel » a pour but de sécuriser le parcours des salariés en leur donnant la liberté de choisir leur avenir professionnel.

Portée par la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, cette loi a été adoptée par l’Assemblée Nationale le 1er août 2018 pour une date d’entrée en vigueur au 1er Janvier 2019. Visant la formation professionnelle, l’assurance chômage et aussi l’alternance, les décrets ainsi que les actions de mise en œuvre de la loi doivent se poursuivre jusqu’en 2022.

La commission #ReinventWork de l’ACSEL s’est penchée sur cette nouvelle réglementation et ses impacts concrets pour les entreprises.

 

 

 


Ce qu’il faut savoir :

A l’origine de la loi
“Cette loi a pour but de définir de nouvelles règles afin d’optimiser l’utilisation des 34 milliards d’euros dédiés chaque année à la formation professionnelle, alors que seuls 27% des salariés en bénéficiaient.” 
Frédéric Lefret, Président FFEEP.

Amandine Vétu et Frédéric Lefret, 4 mars, matinale #ReinventWork ACSEL chez Valtus. ©JJ Repussard

“La loi Avenir professionnel répond à un besoin de simplification et de lisibilité du droit de la formation professionnelle. Elle traduit également la volonté du gouvernement de favoriser l’émergence d’une “société de compétences”. A cette fin, le législateur a accru l’autonomie des actifs dans la définition de leurs parcours professionnels tout en développant un mécanisme de co-construction avec les
Amandine Vétu, Avocate associée chez Flichy Grangé Avocats.

Décryptage

“La réforme responsabilise l’individu et l’entreprise pour garantir l’employabilité. Se former aux compétences du futur est d’autant plus important dans le contexte actuel et ne peut pas être remis à demain. 
Et si les crédits formation étaient utilisés pour à la fois préserver les emplois et se préparer aux transformations à venir ? Et si nous nous saisissons des nouvelles approches pédagogiques pour innover tout en apprenant ?”
Perrine Grua, Co-présidente de la commission #ReinventWork de l’ACSEL et co-fondatrice de France Apprenante

Byebye le plan de formation ; bienvenue au plan de développement des compétences !

Beaucoup plus créatif et bien plus prometteur, notre bon vieux plan de formation devient le plan de développement des compétences. Simple changement de nom ? Promesse d’un avenir professionnel meilleur ? Brouillard opacifié autour de la formation et de ses acteurs ? Au-delà du changement de nom, qu’est-ce que cela implique pragmatiquement ?

“La capacité d’apprendre à apprendre est un des facteurs clefs de succès pour améliorer son employabilité dans un monde qui change. Cette réforme permet à chaque individu de redevenir acteur de son parcours de formation, afin de développer les compétences qui lui sont nécessaires pour préparer son avenir. C’est aussi une immense opportunité pour renforcer les compétences de savoir-être, les fameuses soft-skills.” 

Isabelle ROUHAN, fondatrice de Colibri Talent, cabinet de recrutement de dirigeants, et auteur des Métiers du Futur publié aux Editions FIRST
Si à priori ce dispositif est enthousiasmant car il redonne à chacun d’entre nous le pouvoir de faire évoluer sa carrière, sur le terrain, la réalité est plus complexe. La distinction entre les actions de formation du fait de l’employeur ; celles induites par les obligations légales liées aux entretiens professionnels ; celles finançables via le CPF des collaborateurs ; les évolutions dans les capacités de financement des OPCO, surtout pour les entreprises de plus de 50 salariés, le plan de développement des compétences, qui pour les dernières ne sera plus financé sur les fonds mutualisés, sème la discorde.

Ceci sans compter sur l’apparition de nouveaux opérateurs incontournables que sont France compétences, la Caisse des dépôts et consignations, les opérateurs de compétences, les commissions paritaires interprofessionnelles régionales (Transitions Pro).


Eclairage :

« Le plan de développement des compétences remplace aujourd’hui le plan de formation. Mais il ne s’agit pas d’une simple évolution terminologique : l’architecture du plan et les financements mobilisables pour sa mise en œuvre ont été complètement repensés par le législateur. Construire un plan pertinent et ambitieux supposera dorénavant d’envisager de nouveaux financements et dispositifs (CPF, etc.), spécialement dans les entreprises de plus de 50 salariés ». 
Amandine Vétu.

Au-delà du trouble, de nouvelles opportunités

La réforme de la formation professionnelle introduit la notion de « parcours » dans la durée et sous différentes formes : présentielles et en ligne. Elle renouvelle et élargit également les dispositifs avec l’AFEST par exemple (Action de Formation En Situation de Travail). Très encadrée, l’AFEST a pour mission de légitimer les actions internes de formation et de montée en compétence des employés. Celles-ci, souvent mises en place de manière informelle, doivent prendre une place prépondérante au sein du dispositif global de formation.

L’entretien professionnel prend du galon

L’entretien annuel est connu de tous mais pas forcément bien mis en place ni suivi. L’entretien professionnel, quant à lui, revêt une connotation plus réglementaire. Toutes les entreprises doivent s’y conformer et établir des programmes d’entretiens professionnels biennaux et un entretien récapitulatif au bout de 6 ans. La loi étant en application depuis 2014, les premiers entretiens récapitulatifs qui visent à faire un bilan de l’évolution globale du salarié auraient dû être réalisés au plus tard ce mois de Mars 2020.

Pas de stress ! Le gouvernement a, dans une ordonnance (n° 2020-387) du 1er avril 2020 portant diverses mesures d’urgence en matière de formation professionnelle, prorogé jusqu’au 31 décembre 2020 la date limite de réalisation de tous les états des lieux récapitulatifs. Mais attention, même si jusqu’à la fin de l’année l’état suspend toutes les opérations de contrôle et de sanction, ces entretiens demeurent incontournables. L’amende pourra toujours tombée à hauteur, pour les entreprises de plus de 50 salariés qui n’auront pas tenu leurs entretiens ou qui n’auront pas accordé de formation à leurs personnels, d’une somme de 3 000€ par salarié. Celle-ci sera versée sur le compte personnel formation (CPF) du salarié.

“Les entretiens professionnels sont le relais, dans l’entreprise, de la volonté des pouvoirs publics d’informer les salariés sur leurs droits en matière de formation professionnelle. Le succès de cette réforme passera donc, en partie, par les informations transmises lors de ces entretiens. Le rôle des managers est ici fondamental : il convient de les sensibiliser aux enjeux en cause (notamment financiers) et de les inciter à être proactifs.”
Amandine Vétu

Focus sur le CPF

Les modalités de mise en œuvre et de financement des différents dispositifs ont aussi subi une cure de rajeunissement : CPF, CPF transition, CEP, pro-A, …

Ainsi, plus personne n’ignore que le Compte Personnel Formation est dorénavant monétisé. Son basculement d’heures en euros n’est pas sans poser souci de lisibilité pour les salariés qui peuvent utiliser leur cagnotte tout simplement via l’apps du site Internet (mais sous conditions d’éligibilité). De plus son utilisation en toute autonomie par le salarié n’implique plus l’entreprise ni l’OPCO.

Un système de certifications plus ordonné

En France, il existe à ce jour 3 types de certification : le diplôme d’Etat, les habilitations et les titres professionnels. Devant l’essor fulminant de ces derniers il a été décidé de remettre de l’ordre. Désormais un seul titre existera par métier, sauf exception.

L’idée aussi de la loi Avenir Professionnel est de garantir la qualité des processus mis en œuvre par les prestataires d’actions concourant au développement des compétences et d’accentuer le recours à l’apprentissage.

Ainsi a été créé le label Qualiopi, marque déposée de France Certification identifiant les organismes de formation en capacité de dispenser une formation de qualité.

D’autre part, en assouplissant les règles d’encadrement des contrats en alternance tant à l’embauche qu’en cas de besoin de rupture anticipée, la volonté du législateur est d’augmenter le nombre de contrats et donc d’embauches à l’issue des périodes d’alternance.

“La réforme des certifications vise à recentrer les prises en charge de l’état et des OPCO sur les formations visant à l’employabilité et de réduire considérablement le nombre de titre professionnel afin qu’à chaque titre corresponde des compétences liés à un métier et non plus rattachée à une structure de formation”
Frédéric Lefret, Président FFEEP

Et sur le terrain dans les entreprises ?

« Le rôle des OPCO est prépondérant dans l’accompagnement et la mise en œuvre de la loi Avenir Professionnel. Si les professionnels des RH se doivent de mettre en place une veille active perpétuelle avec ou sans leur organisme paritaire préféré, leur syndicat ou fédération de référence, il faut aussi fédérer et interagir avec l’ensemble des managers de l’entreprise sur l’intégralité du cycle de la gestion de carrière des collaborateurs.”  
Corinne Estève Diemunsch, DRH Limonetik. 

Les équipes RH au sein des entreprises sont sur-sollicitées par des demandes multiples à tous les niveaux.

« Il est indispensable de créer un binôme Managers-RH pour accompagner le développement des compétences de ses personnels. La formation ne se limite pas aux heures passées en dehors du cadre quotidien professionnel, le bureau. Il est nécessaire de valoriser auprès de chacun les efforts internes de coaching, mentorat, accompagnement, qui sont menés en continu. »
Jean-Philippe Khristy, Directeur Commercial Services de Confiance chez DOCAPOSTE

Des démarches de bien-être en entreprise aux nouveaux encadrements législatifs du télétravail, des nouvelles tendances en termes de management aux défis du recrutement de talents, sur une toile de fond de transformation digitale intense, les personnels des ressources humaines se voient chahutés

“Les équipes RH sont devenues les chefs d’orchestre du levier de motivation qui fait que les collaborateurs évoluent et ont envie de donner le meilleur d’eux-mêmes.”
Sandrine Meunier, Chief People Officer @Aircall

Jean-Philippe Khristy et Sandrine Meunier 4 mars, matinale #ReinventWork ACSEL chez Valtus. ©JJ Repussard

L’entretien annuel est connu de tous mais pas forcément bien mis en place ni suivi. L’entretien professionnel, quant à lui, revêt une connotation plus réglementaire. Toutes les entreprises doivent s’y conformer et établir des programmes d’entretiens professionnels biennaux et un entretien récapitulatif au bout de 6 ans. La loi étant en application depuis 2014, les premiers entretiens récapitulatifs qui visent à faire un bilan de l’évolution globale du salarié auraient dû être réalisés au plus tard ce mois de Mars 2020.

Pas de stress ! Le gouvernement a, dans une ordonnance (n° 2020-387) du 1er avril 2020 portant diverses mesures d’urgence en matière de formation professionnelle, prorogé jusqu’au 31 décembre 2020 la date limite de réalisation de tous les états des lieux récapitulatifs. Mais attention, même si jusqu’à la fin de l’année l’état suspend toutes les opérations de contrôle et de sanction, ces entretiens demeurent incontournables. L’amende pourra toujours tombée à hauteur, pour les entreprises de plus de 50 salariés qui n’auront pas tenu leurs entretiens ou qui n’auront pas accordé de formation à leurs personnels, d’une somme de 3 000€ par salarié. Celle-ci sera versée sur le compte personnel formation (CPF) du salarié.
La réforme oblige tout un chacun à tous les niveaux des entreprises, quels que soient leur taille et leur secteur d’activité, à être agile, créatif, réactif et proactif. Que peut-on offrir aux collaborateurs de nouveau ? Comment renouveler le package RH pour le fidéliser ?

“Il s’agit d’un sujet plus profond de marque employeur. Le collaborateur doit s’approprier l’identité de l’entreprise et nous, les managers, devons l’accompagner pour cela et mettre en place avec les RH toutes les actions possibles (savoir, savoir-faire et le savoir-être). Cela peut passer par des ateliers réguliers qui se vivent en inter équipes, donner du sens à chaque mission de chaque service, associer les RH et la Communication dans la mise en avant de la marque Employeur et la déclinaison de ses valeurs, mettre à disposition des salles de détentes chaleureuses, proposer un kit de bienvenue pour accueillir un nouveau collaborateur, etc.  »
Jean-Philippe Khristy.

 
Dans cette nouvelle dimension tant Organisationnelle, Légale, Philosophique qu’Humaine, la réinvention professionnelle est à l’ordre du jour !


 

  Article réalisé par Corinne Estève Diemunsch,
membre de la commission #ReinventWork ACSEL,
Dir Marketing / Com et DRH Limonetik